La Feuille Fidésienne 3 est sortie… Lecture complète et suite de l’interview de Peggy Bouzaglou

Nous sommes heureux de poursuivre ce travail d’information de l’association SainteFoyAVENIR à travers La Feuille Fidésienne numéro 3.

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Voici l’intégralité de l’interview de Peggy Bouzaglou et de son point de vu sur le tissu associatif…


Peggy Bouzaglou

23 ans comme professionnelle des Centres Sociaux, dont 15 ans en poste de direction. Elle a commencé sa vie professionnelle en centre d’hébergement d’urgence, puis a eu l’opportunité de piloter la création d’un Centre Social à Paris, avec notamment l’expérience d’accompagnement d’habitants. Après son départ des Centres sociaux de Fidésiens, elle a choisi une position de conseil et d’accompagnement des structures associatives sur trois dimensions : la formation des dirigeants associatifs, l’appui à l’organisation pour des structures qui rencontrent des difficultés, et l’accompagnement en formation des équipes professionnelles. Elle résume elle-même : Un parcours classique de l’éducation populaire, avec une implication dans l’animation enfance jeunesse.

Que pensez-vous de la situation des associations confrontées au covid-19 et aux confinements ?

Les associations de solidarité et de lien social n’ont jamais arrêté. 

Il y a eu deux temporalités : 
Celle du 1er confinement après le temps de sidération, il y a eu une réactivité pour maintenir de l’activité. En fonction du domaine d’intervention, de leur objet, elles ont créé de nouveaux outils, adapté leurs pratiques. Cela a eu pour conséquence de l’innovation et un déploiement d’énergie pour maintenir du lien, de l’aller vers.

Le confinement a permis de donner du temps pour de la coconstruction et de l’espace pour la création d’initiatives. Lors de l’annonce très rapide de redémarrage le 18 mai, les acteurs commençaient à s’adapter à ces nouvelles pratiques et à ce nouveau rythme ; il n’y a pas eu le temps de consolider les innovations. Ce redémarrage a demandé une énorme énergie, une charge lourde pour mettre en place les protocoles sanitaires mouvants et adapté les actions à mener.

Il a pu y avoir une solidarité entre associations qui avaient déjà travaillé ensemble et qui ont pu coopérer, alors qu’elles pouvaient être dans une certaine concurrence.

Celle du 2e confinement plus partiel, les associations comme les habitants subissent plus, avec cette question lancinante : Jusqu’à quand ça va durer ?  La perte de liens, de motivation, pour les associations qui ne peuvent plus agir, et parfois l’installation de l’attentisme. La réalité économique est très différente d’une association à l’autre : en fonction de leur dépendance à des locaux qui ont été fermés, ou selon qu’elles ont ou des salariés qui produisent des services et peuvent bénéficier du chômage partiel.

Des disparités sont apparues en matière de ressources matérielles et numériques. La crise a pu révéler aussi des besoins de changement de vie personnelle et professionnelle des salariés et des bénévoles, qui auront des conséquences en termes de renouvellement des équipes.

Globalement, les financeurs les ont soutenues avec le maintien des subventions. Celles qui ont un fonctionnement autofinancé par leur activité subissent plus d’impacts.

De nombreuses associations se sont débrouillées seules pour les mesures sanitaires. Celles qui font partie de fédérations nationales ont été outillées sur les protocoles, les achats groupés, les négociations de prix.

Quel rôle des administratrices, administrateurs, des bénévoles dans la traversée de cette période

Dans une société de plus en plus individualiste, les bénévoles ont eu un rôle de maintien du lien social et ont joué le jeu de la solidarité, de l’entraide. Ils, elles ont fait preuve d’adaptation et de responsabilité, de leur capacité à se poser les bonnes questions.

Mais certaines, certains ont été submergés par la gestion de la crise. Parfois la peur a pris le pas et ôté la possibilité de se projeter.

L’état de l’association avant la crise (par exemple enkystée ou dans la routine ou la personnalisation plutôt que dans un fonctionnement collégial et coopératif) a pu se révéler pendant le confinement. Pour des associations qui connaissaient des dysfonctionnements internes, soit ils se sont amplifiés (enjeux de pouvoir, conflits), soit le fait d’avoir à gérer une crise plus forte que la crise interne a permis une mobilisation collective et un dépassement des difficultés.

De façon générale, les bénévoles se sont donné les moyens de maintenir l’association et d’agir dans l’intérêt général.

Compte tenu du rôle essentiel des associations pour la vie sociale, culturelle, sportive comment penser l’avenir ?

La crise a révélé à la fois des problématiques sociales, et la question de l’isolement, avec ses conséquences psychologiques. Elle a mis en exergue le besoin essentiel de lien, de collectif. Il faudra pour l’avenir prendre en compte ces problématiques. Pour cela le maillage associatif de proximité peut, en se coordonnant, en coopérant, apporter des réponses réactives, adaptées, sur mesure, et qui impliquent les habitants dans la transformation de leur quotidien.

Les services publics ont joué leur rôle. Pour une intervention fine de proximité, les associations restent essentielles. Elles permettent de générer de l’intelligence collective, par le développement du travail collaboratif d’habitants.

Pour lutter contre l’isolement et répondre aux problématiques sociales, il faut que les associations aillent bien. Cela nécessite un appui au-delà du technique, aux relations interpersonnelles. Les bénévoles peuvent avoir besoin de parler, pour se décaler du simple vécu brut. La pandémie, le confinement ce n’est pas la normalité. Il s’est produit quelque chose d’important qui dure et qui de fait est de l’ordre du traumatisme. Il faut le traiter.

Quel rôle de la collectivité pour la vie associative, dans ce contexte ?

Dans l’après-coup, ce serait important de mettre l’ensemble des acteurs autour de la table pour échanger sur les bonnes pratiques développées au cours de la pandémie et inscrire ainsi une dynamique collective dans le temps.

La collectivité peut permettre la définition d’une stratégie, organiser une coordination, une complémentarité entre les associations.

À l’échelle de la ville, des quartiers il faut pouvoir valoriser l’engagement et aider à l’élaboration d’une réponse coordonnée aux enjeux sociétaux qui se sont révélés.

Il faudrait également organiser une information sur qui fait quoi, qui est présent où, pour éviter les réponses redondantes et apporter de l’outillage sur les procédures, sur l’explicitation des textes Covid-19, des appuis techniques.

Renforcer le soutien à la vie associative par des ressources et aussi par une démarche pour faire vivre le réseau associatif en :
• Ayant à minima un.e élu.e et un.e fonctionnaire dédié.e.s pour mettre en place des instances pérennes de concertation, de coconstruction.
• Développant un conventionnement global et pluriannuel avec des pactes de coopération qui reconnaissent le rôle et la place des associations et les sécurisent.

Propos recueillis par La Feuille Fidésienne en janvier 2021.